Après des années de bons et
loyaux services, cette honnête travailleuse allait terminer sa carrière, comme
c'est souvent le cas, sur un bout de trottoir, exposée à la pluie, au froid, et
pire au mépris des passants !
J'aime trop le bois et les
meubles pour les laisser ainsi à leur triste sort, condamnés à la décharge, aussi
simples soient-ils. Alors gorgée d'eau, décollée de toute part, triste mine ;
sordide épilogue pour cette table à ouvrage, aussi appelée "travailleuse".
Ni une, ni deux, J'embarquai la travailleuse bancale.
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Relookage d'une table à ouvrageAvant restaurationPlacage décollé - absence du miroir |
Au fait, d'où venait-elle cette
travailleuse ? Dans sa première vie, je l'imaginais aux côtés d'une petite
mamie toute ridée. Et qui dit mamie, dit immédiatement grand-mère.
Ma grand-mère et sa travailleuse
pleine de cartonnettes de cotons à repriser, son précieux dé à coudre tout cabossé,
un porte-aiguilles fabriqué par ses petites filles et cher à son cœur, de
ravissants petits ciseaux à broder et surtout un bel œuf en bois, lisse et
brillant d'avoir tant reprisé ! Qui connaît encore ce merveilleux objet de nos
jours ? C'est ma madeleine à moi cet œuf, il renferme tous mes souvenirs, toute
mon enfance et ma si chère grand-mère. Je la revois, ombre fragile assise près
d'une fenêtre, dans un rai de lumière, reprisant quelques chaussettes trouées,
les lunettes sur le bout du nez ! Elle s'installait toujours dans le même
fauteuil après le déjeuner et reprisait les patates des papapouces ! Comprenez
les trous que font les pouces de pieds dans les chaussettes.
Mais je vous parle d'un temps que
les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître ! Nous étions loin de cette
consommation à tout crin. J'aime à croire que c'est d'elle que je tiens cette
manie de ne rien jeter, de récupérer et de réparer.
Propos décousus pour histoires de
couture ? Reprenons le fil et revenons à notre ouvrage. En mémoire de toutes les
mamies du monde, qui patiemment reprisaient, rapiéçaient ou ravaudaient, cette
table à ouvrage sera, à son tour, raccommodée.
Il lui fallait un grand coup de
soleil. Envie de lui redonner quelques couleurs à cette petite table, un peu de
gaité. Et puis de vous à moi, le style shabby chic ou pas chic à toutes les
sauces…. Un peu trop vu !
Mais d'abord, nettoyage,
recollage, déplaquage, ponçage ; elle avait déjà meilleure allure. Je me la
joue à la Mary Poppins ; une petite chanson, un claquement de doigts, un coup
de superkalifragilistic et hop prête pour l'étape suivante, un coup de peinture
? D'accord mais la couleur ?
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Travailleuse après recollage, déplaquage et ponçage |
Soudain, épinglées au mur de l'atelier,
trois reproductions d'Elisabeth Vigée-Le Brun m'ont fait un clin d'œil. Ce sera
un joli bleu et un bel orange ! Intéressant de s'inspirer de cette grande
portraitiste du 18ème, indépendante, féministe avant l'heure, qui
réussit à s'imposer en France en Europe jusqu'en Russie. Transposer sa touche
précieuse et raffinée sur ce petit meuble d'une extrême simplicité ça
fonctionne ; lui donnant plus d'allure et plus de caractère.
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Portraits d'Elisabeth Vigée-Le Brun |
Voilà comment une petite table à
ouvrage s'est retrouvée pimpante sans perdre son âme !
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Travailleuse après restauration Peinture à la caséine et cire incolore |
"le bleu, couleur intemporelle et raffinée" nous dit Marie Claire Maison.com dans son billet du 22/03/2015 !
Bonne nouvelle ! Elisabeth Vigée-Le brun sera
exposée au Grand Palais du 22/09/2015 au 11/01/2016. http://www.grandpalais.fr/fr/evenement/elisabeth-louise-vigee-le-brun
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